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chiduc quitta Bruxelles pour entreprendre son voyage.

Le traité de Vervins (2 mai 1598) avait mis fin à la guerre longue et sanglante que les Pays-Bas avaient eu à soutenir contre la France. Mais l’Espagne était toujours en état d’hostilité avec la reine Élisabeth, et les états généraux des Provinces-Unies persistaient à se refuser à toutes propositions d’accommodement basées sur la reconnaissance des droits de souveraineté de l’Infante. À l’intérieur, la situation était déplorable ; il n’y avait plus ni agriculture, ni industrie, ni commerce, et, pour comble de maux, plusieurs garnisons, n’étant pas payées, s’étaient mises en état de rébellion ouverte : celle du château d’Anvers s’était portée à des actes d’insolence sans exemple, jusqu’à ce point qu’elle avait tiré des coups d’artillerie contre l’hôtel de ville, au moment où le magistrat y était assemblé. Cette mutinerie donna de grandes préoccupations au cardinal André ; il parvint cependant à l’apaiser et à faire sortir les mutinés du château d’Anvers (10 février 1599) ; il obtint aussi que ceux de Lierre et du château de Gand se soumissent. Tant qu’avait vécu Philippe II, un rapprochement entre l’Angleterre et l’Espagne aurait semblé impossible. Ce monarque étant descendu au tombeau (13 septembre 1598), le cardinal jugea le moment favorable pour tenter la voie des négociations : il fit faire à Élisabeth des ouvertures qui furent bien accueillies, mais qui cependant n’aboutirent à aucun résultat. Par la paix de Vervins, Henri IV s’était obligé à ne souffrir qu’aucun de ses sujets allât servir, par terre ou par mer, les ennemis du roi d’Espagne et des archiducs. André, ayant été informé, au commencement de 1599, que des levées de gens de guerre se faisaient, sous main, en France, par le seigneur de la Noue, pour le compte des états généraux, et que les soldats ainsi levés s’embarquaient secrètement à Dieppe, à la Rochelle et dans les ports voisins, envoya à Paris le baron de Bassigny pour s’en plaindre. Le roi fit droit à sa réclamation ; il enjoignit au sieur de la Noue et à tous autres ses sujets, quels qu’ils fussent, qui se trouvaient en Hollande, de revenir dans le royaume, sous peine de confiscation de corps et de biens ; dans le même temps, il ordonna au grand prévôt de France de se rendre à Metz, pour informer contre les officiers et les soldats de la garnison de cette place qui avaient voulu surprendre la ville belge de Charlemont, et pour faire une justice exemplaire des coupables.

L’archiduc Albert, en partant, avait confié le commandement de l’armée à Francisco de Mendoza, marquis de Guadaleste, amiral d’Aragon ; il lui avait recommandé de s’assurer à tout prix d’un passage sur le Rhin qui lui donnât le moyen de pénétrer jusqu’au cœur des Provinces-Unies. Mendoza s’empara d’Orsoy, ville neutre dépendante de l’État de Clèves ; de Rhinberg, où les Hollandais avaient garnison, mais qui appartenait à l’archevêque de Cologne ; de Burick, dépendant aussi du pays de Clèves ; de Wesel, qui, soumis autrefois au souverain de ce pays, affectait de ne reconnaître d’autre autorité que celle de l’Empereur ; de Rees, à six lieues de Wesel, et enfin d’Emmerich, la plus grosse ville du duché de Clèves. Obligé, par l’approche du comte Maurice de Nassau, de renoncer au siége de Doesburg, il se rejeta sur Dotekom, qui lui ouvrit ses portes, ainsi que le château de Schulenbourg. Dans cette expédition, les troupes espagnoles commirent les plus graves excès : manquant presque toujours d’argent et de vivres, elles pillèrent et ravagèrent les terres des amis aussi bien que des ennemis, sans se soucier des clameurs de la noblesse et du peuple. Lorsque les pluies ne permirent plus de tenir la campagne, Mendoza fit prendre des quartiers d’hiver à son armée dans le pays de Clèves et en Westphalie. Cette charge, si onéreuse déjà en elle-même pour les habitants, devint intolérable par les désordres auxquels les soldats et leurs chefs se livrèrent. Les princes dont la neutralité et l’indépendance étaient ainsi violées, firent entendre des plaintes amères. Ceux du cercle de Westphalie, et le duc de Clèves en particulier, envoyèrent des ambassadeurs à Bruxelles, chargés