Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 1.djvu/438

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

facture large et aisée, réunit une grande richesse de pensées et une diction latine épurée sans trop d’enflure.

Il a laissé en outre un nombre considérable de lettres dont le style offre un grand charme, quoique traitant, en général, des sujets assez insignifiants. Son caractère vif et impressionnable, ses aspirations philosophiques, sa morale quelque peu relâchée s’y révèlent entièrement.

L’érudition profonde de l’auteur, qui entremêle beaucoup de phrases grecques au texte latin de ses écrits, y est toujours relevée par un tour délicat. Il a malheureusement le tort de s’y plaindre sans cesse de la pauvreté, dans laquelle ses débordements le précipitaient. Ses discours politiques, ses oraisons funèbres, son mémoire sur l’usure, et d’autres écrits de circonstance étaient fort goûtés par les beaux esprits de son temps. L’éloge que fait de Baudier l’illustre Grotius prouve assez de quelle réputation jouissait cet homme distingué, que les malheurs de l’époque et ses infortunes personnelles avaient si vigoureusement trempé.

Comme historien, il s’est fait connaître par un travail estimé sur la fameuse Trêve de douze ans, conclue en 1609, et qui ne fut publié qu’après sa mort.

Malheureusement, tant de qualités intellectuelles ne s’accordaient guère, ni avec ses mœurs, ni avec sa conduite privée. Sa vanité, qui était presque ridicule, avait fini par lui aliéner les plus chaudes sympathies. Criblé de dettes, souvent honteuses, adonné au vin et à la débauche, il se livra, dans les dernières années de sa carrière, à tous les excès, sans respect pour l’opinion publique ou pour les positions qu’il avait obtenues. Ces dérèglements autant que le chagrin d’avoir perdu sa première femme, contribuèrent à abréger une vie, déjà minée par de longs travaux et une agitation que l’âge même n’avait point tempérée.

A côté de ces dérèglements dont il fut la première victime et avec lesquels contrastait sa devise Αἵεν’ αρισρευειν (toujours être vertueux), il faut citer les qualités de son cœur aimant, sa fermeté, sa franchise et surtout sa fidélité envers ses amis. Baudier est un bizarre mélange de vertus et de mauvais penchants, comme on en retrouve beaucoup dans les époques de troubles. Si ses défauts n’ont pas laissé trop de traces dans ses écrits variés, on ne saurait toutefois lui pardonner cet esprit ironique, ce besoin de la satire dont il fait un abus par trop fréquent.

Quelques mois avant son décès, il se remaria, et sa seconde femme mit au monde une fille posthume.

Les publications de Baudier sont très nombreuses et ont eu plusieurs éditions. Paquot et Vander Aa en donnent une liste détaillée, ce qui nous dispense d’en joindre ici l’émunération.

Rubens, avec qui il était en correspondance, exécuta son portrait, gravé plus tard en tête de la seconde édition de ses lettres et de la troisième de ses poésies, avec ces deux vers de Gruterus, tout pleins de l’exagération de l’époque :

Vane pictor œre credis posse reddi Baudium
Baudium referre nemo quiverit ?

                               Quam Baudius.

Bon de Saint-Genois.

Hoffman-Peerlkamp, De poetis neerlandorum, pp. 233-239. — Vander Aa, Biographisch woordenboek, t. I, pp. 56-57. — Paquot, Mémoires, t. VIII, pp. 390-404. — Archives historiques et littéraires du Nord de la France, 1re série, t. II, pp. 296-303 (L’abbé Coupé). — De Windt, Nederlansche Geschiedschryvers, pp. 282 et 316. — Nouvelle Biographie universelle, publiée par Didot, t. IV.

BAUDOUIN ou BALDWIN Ier, comte de Flandre, que sa force et sa bravoure firent surnommer Bras de fer, était, à ce qu’on croit, fils d’Ingelram, envoyé royal dans le nord de la Gaule. Il gouvernait sagement un district peu étendu, où s’élevèrent plus tard les villes de Bruges et de Rodenbourg[1], quand il revit, dans la résidence royale de Senlis, la princesse Judith, fille de Charles le Chauve et veuve d’un roi de Wessex, dont il avait ambitionné la main, lorsqu’elle sortait à peine de l’enfance. La reine était jeune encore et Baudouin distingué par les qualités les plus brillantes ; il lui fit aisément partager ses sentiments, et de l’aveu de son frère, plus tard Louis le Bègue, il la conduisit dans ses domaines et l’épousa

  1. Plus tard Ardenbourg.