Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 2.djvu/37

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gouvernement et de la capitainerie générale des Pays-Bas. Cette cour éphémère, emportée comme par un ouragan, le duc la suivit à Vienne, où il eut, deux années plus tard, en 1796, le malheur de perdre l’unique héritier de son nom. À ce malheur domestique vint se joindre bientôt la menace d’un autre désastre. Le duc se vit porté sur la liste des émigrés et tous ses biens furent séquestrés. Cependant il obtint, le 9 juin 1800, d’être rayé de la liste de proscription. Mais restait le serment de fidélité à la Constitution française exigé de tous ceux dont les noms avaient figuré sur les listes de l’émigration. Le duc ne le prêta point, et il se borna à faire simplement acte de présence en Belgique quelques jours avant le 2 décembre 1805, où la perte de la bataille d’Austerlitz mit l’Autriche à la discrétion de la France. Le traité de Presbourg ayant, bientôt après, rétabli la paix entre les deux puissances, il put retourner tranquillement à Vienne. Il y épousa en secondes noces, le 1er octobre 1807, Ernestine-Marguerite, comtesse de Stahremberg, fille du prince de ce nom et de la princesse Marie-Louise-Françoise d’Arenberg.

Une des principales préoccupations du duc était toujours de faire reconnaître sa qualité de sujet autrichien. Ses démarches à cet effet étaient sur le point d’aboutir, lorsque parut tout à coup un décret par lequel l’empereur Napoléon enjoignait à tous les Belges qui avaient accepté un service civil ou militaire d’une puissance étrangère de rentrer dans leur patrie avant le 9 avril 1809 ; car la guerre venait d’éclater de nouveau entre la France et l’Autriche. Compris dans les termes de ce décret, le duc de Beaufort se vit directement menacé, par la haute police de l’empire, de la confiscation de tous ses biens, situés en Belgique, s’il tardait à regagner le territoire français. Force lui fut donc de rentrer à Bruxelles, où il reçut aussitôt l’ordre de fixer sa résidence à Paris. Là rien ne fut épargné, ni séductions ni menaces, pour l’amener à se rallier au gouvernement impérial et à accepter la charge de chambellan à la cour de Napoléon. Il résista aux offres comme aux intimidations. Sur ce refus, il reçut l’ordre de renvoyer la clef de chambellan à l’empereur François II. Il la remit au prince de Schwarzenberg, ambassadeur d’Autriche en France, mais non sans faire connaître qu’il ne cédait qu’à la contrainte. Dès ce moment il vécut à Paris sous l’œil invisible, mais toujours ouvert, de cette police que le duc d’Otrante avait organisée avec un soin qui avait tous les caractères d’une véritable science.

Durant les trois années que le duc de Beaufort passa de la sorte à Paris, il ne reçut qu’à trois reprises l’autorisation de passer quelques semaines dans ses terres en Belgique. La troisième fois qu’il lui fut permis de revoir le sol natal, la nouvelle de la défaite essuyée par l’armée française à Leipzig, le 13 octobre 1813, se répandit dans nos provinces. Le 2 février suivant, l’avant-garde des armées alliées fit son entrée à Bruxelles. Les Pays-Bas hollandais étaient déjà rentrés en possession de leur autonomie. Mais les provinces belges, qu’allaient-elles devenir ? Après avoir invité, dans une proclamation, toutes les forces vives du pays à se rallier à la cause commune de l’Europe, les alliés voulurent laisser croire à la Belgique qu’elle serait constituée en nation indépendante, et ils organisèrent, dans ce dessein, un gouvernement provisoire composé entièrement d’éléments nationaux. Le 12 février 1814, le duc de Beaufort-Spontin fut nommé gouverneur général des Pays-Bas autrichiens, et on lui adjoignit un conseil composé du comte Eugène de Robiano, de M. de Limpens, ancien chancelier du Brabant, et de M. de la Vielleuse. Malheureusement, à ce conseil on ne laissa toute liberté d’action que pour régler les questions religieuses et rétablir les rapports entre l’État et l’Église, si gravement troublés durant la domination française. D’un autre côté, des commissions militaires, agissant au nom du gouverneur général, se livraient de leur propre chef à l’arbitraire en faisant arrêter les citoyens soupçonnés de sympathie pour le gouvernement déchu. Enfin, les partis étaient fort divisés sur la question de l’avenir