Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 3.djvu/280

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tés et bénéfices? Ces questions, qui occupaient le public avant même que les cortès se réunissent, donnèrent lieu à beaucoup de débats dans leur sein et de discussions avec les ministres. Enfin, le 7 février 1518, les trois états des royaumes de Castille, de Léon et de Grenade reçurent Charles pour leur roi et seigneur, conjointement avec la reine sa mère; à partir de ce jour, tous les actes émanés de l’autorité royale portèrent en tête le nom de la reine et le sien. La session des cortès s’acheva d’une manière entièrement conforme à ses vœux. Cette assemblée lui accorda un subside plus considérable qu’aucun souverain de la Castille n’en eût encore obtenu.

Le 22 mars Charles se met en route pour l’Aragon, après avoir réglé l’organisation de la maison de la reine doña Juana, à la tête de laquelle il place, en qualité de gouverneur, le marquis de Denia, qui avait rempli la charge de grand maître dans celle de Ferdinand le Catholique. A Aranda de Duero il se sépare de son frère, qu’il avait résolu d’envoyer aux Pays-Bas et qui va s’embarquer à Santander. Le 6 mai il arrive aux faubourgs de Saragosse; trois jours après il fait son entrée dans cette capitale. Il se dirige vers la cathédrale de San Salvador : là, en présence de la dépulation du royaume, des chefs de la ville, de l’archevêque, d’un grand nombre de membres des cortès, il jure, au nom de sa mère et au sien, d’observer les lois, priviléges, libertés et coutumes de l’Aragon. La députation avait longuement délibéré, elle avait consulté les plus savants magistrats et les jurisconsultes les plus fameux sur le point de savoir si elle assisterait à la cérémonie au cas que Charles y voulût prendre le titre de roi; elle avait même demandé là-dessus l’avis des membres des cortès : l’opinion générale était que Charles devait, à son entrée, se contenter du titre de prince; néanmoins les députés se déterminèrent à condescendre à son désir, et ce fut comme roi qu’il jura à San Salvador. Le 20 mai Charles ouvre les cortès; il leur demande deux choses : qu’elles lui prêtent serment, ainsi qu’à la reine sa mère, et qu’elles lui accordent un subside. La première de ces demandes soulève de nombreuses objections; c’est seulement le 27 juillet que les quatre bras du royaume y font une réponse favorable. Le 29 les cortès prêtent serment à la reine doña Juana et au roi don Carlos conjointement, après qu’il a renouvelé devant elles celui de maintenir les fueros de l’Aragon. Le subside n’est voté qu’au mois de janvier, au grand déplaisir de Charles, qui se voit forcé de demeurer à Saragosse beaucoup plus longtemps qu’il n’aurait voulu. Dans l’intervalle il conclut le mariage de sa sœur Éléonore avec le roi de Portugal Emmanuel le Fortuné; cette princesse part le 9 octobre pour aller se réunir à son époux.

Charles quitte enfin Saragosse (24 janvier 1519). Son grand chancelier, Jean le Sauvage, était mort en cette ville[1]; il l’avait remplacé par un Piémontais, Mercurino di Gattinara, qui avait été président de Bourgogne, et auquel l’archiduchesse Marguerite et l’empereur Maximilien avaient confié d’importantes négociations. Dans le trajet de Saragosse à Barcelone, il apprend la mort de l’empereur[2]; il ne la divulgue qu’après son entrée dans la capitale de la Catalogne, qui a lieu le 15 février. Le 1er mars, à la cathédrale, il fait célébrer les obsèques de son aiëul; le 5 et les jours suivants, il y tient un chapitre de la Toison d’or où il appelle à prendre séance les chevaliers dont il avait fait choix parmi les grands seigneurs de la Castille et l’Aragon. Il ouvre les cortès le 13 avril et leur fait les mêmes demandes qu’il avait faites aux Castillans et aux Aragonais. Elles répondent sur-le-champ, par la bouche de l’archevêque de Taragone, qu’elles sont prêtes à le reconnaître pour leur prince souverain, et la prestation réciproque des serments s’accomplit le 16. Depuis l’arrivée de Charles à Valladolid, la reine Germaine de Foix, veuve de Ferdinand le Catholique, se trouvait à sa cour; il la marie, à Barcelone, au marquis Jean de Brande-

  1. Le 6 juin.
  2. Le 12 janvier à Wels, dans la haute Autriche.