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AUX MONTAGNES ROCHEUSES

Nous passons la soirée dans la pièce commune, et je me mets à écrire ou à raccommoder mes vêtements, qui tombent en lambeaux. Quelques-uns jouent aux cartes ; les chasseurs étrangers et les chercheurs d’or s’étendent par terre, et l’on commence à nettoyer les fusils, à fondre des balles, à faire des filets, à réparer les attirails de pêche, à rendre les bottes imperméables. Nous chantons des chansons à plusieurs parties, et, vers huit heures, je traverse l’herbe glacée pour me rendre dans ma cabin, où je m’attends toujours à trouver quelque chose. Chacun lave son linge, et, comme j’en ai très-peu, je passe une partie de mes journées devant le baquet à lessive. La politesse et les bienséances règnent dans notre réunion mélangée, et quoique divers rangs de la société s’y trouvent en contact, il existe une véritable égalité démocratique ; il n’y a point d’avances d’un côté, ni de condescendances de l’autre.

Evans est parti pour Denver il y a huit jours ; il a conduit aux plaines sa femme et ses enfants pour qu’ils y passent l’hiver. La joie de nos réunions s’en est allée avec lui. Edward est sombre, excepté le soir, lorsque, étendu sur le parquet, il raconte les épisodes de ses marches avec Sherman à travers la Géorgie. J’ai remis à Evans un billet de cent dollars pour qu’il me le change, et lui ai demandé de m’acheter un cheval pour mon voyage. Nous l’attendons depuis trois jours. Je n’ai pas de lettres de vous depuis cinq semaines, et je peux à peine contenir mon impatience. Deux ou trois fois dans la journée, je monte à cheval ou fais à pied trois ou quatre milles sur la route de Longmount,