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VOYAGE D′UNE FEMME

atteint le corral ; c’est un herbage d’une acre, entouré de fortes palissades faites de poteaux et de traverses de sept pieds de haut. Avec beaucoup de patience et d’adresse, nous avons logé le troupeau tout entier dans son abri, et, si sauvage qu’il fût, nous l’avons fait sans un coup, sans un cri, sans même un claquement de fouet. Le froid était épouvantable. Nous avons mis un peu plus de quatre minutes à faire au galop le mille et demi qui nous séparait de la cabin, que nous avons atteinte au moment où la neige commençait à tomber. On nous avait préparé du thé chaud et fort.

18 octobre.

Nous sommes bloqués par la neige depuis trois jours ! Hier, c’était si horrible, que je n’ai pu vous écrire. On a abandonné toute occupation, et on ne parle que de la tempête. Les chasseurs se tiennent dans la salle près du grand feu, et ne sortent que pour aller chercher du bois et déblayer la neige devant la porte et aux fenêtres. Je n’ai jamais passé de nuit plus épouvantable que celle d’avant-hier, seule dans ma cabin au milieu de l’ouragan ; le toit se soulevait, la boue s’en détachait et une neige fine pénétrait par les fentes, tandis que les branches mortes, tordues par le vent et chargées de neige, craquaient et se rompaient incessamment. J’entendais des cris aigus, des hurlements, le tonnerre et une quantité de bruits étranges. Il était tombé beaucoup de neige dans la journée, et, pendant les premières heures de la nuit, il en tomba encore un pied qui, s’amoncelant contre ma porte, me bloqua complétement. Vers minuit, le mercure tomba à zéro,