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VOYAGE D′UNE FEMME

tout beau et grand. Le dernier mineur que j’avais rencontré m’ayant donné des indications très-précises, je quittai la route et pénétrai dans les solitudes, nappes de glace d’abord, puis de neige ; il y en avait plus d’un pied ; elle était pure et friable. Je dus entreprendre ensuite une excursion très-difficile, à travers une forêt de pins où il faisait presque nuit. Mon cheval enfonçait dans de profonds amas de neige, mais le but était atteint et il n’était pas trop tôt. À une hauteur de près de 12, 000  pieds, je m’arrêtai sur le bord d’une pente escarpée. Au-dessous de moi, complétement environné d’épaisses forêts de pins dominées par les montagnes rougies et glorieuses aux rayons du soleil couchant, s’étendait Green Lake ; il semblait que ce fût une surface liquide, mais ce n’était en réalité qu’une nappe de glace de deux pieds d’épaisseur. J’avais échangé le froid et la tristesse des régions inférieures pour la lumière du soleil couchant, l’air pur et la splendeur des œuvres non profanées du Créateur. Je me rappelai le verset : « L’obscurité s’est dissipée et voici que la lumière brille maintenant ! ».

C’était bien quelque chose d’avoir atteint cette hauteur et d’assister à la magnificence lointaine du soleil couchant, qui rappelait à ma pensée que ni Dieu ni son soleil n’ont encore abandonné le monde. Mais ce soleil s’abaissait rapidement, et, tandis que je contemplais encore la vision merveilleuse, toute cette gloire s’évanouit et les pics devinrent gris et tristes. J’éprouvais une sensation étrange en songeant que j’étais, à cette altitude glaciale, le seul être humain :