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AUX MONTAGNES ROCHEUSES.

songe ; à droite, les vagues de la prairie mouraient dans le lointain, tandis qu’à gauche elles se brisaient en grandes lames de neige contre les montagnes Rocheuses. De toute la journée, nous ne vîmes pas une créature vivante. Jim était presque constamment silencieux. Comme tous les enfants des montagnes, il devient triste alors même qu’il n’en est absent que momentanément.

Au coucher du soleil, nous sommes arrivés à un groupe de maisons appelé Namaqua, où, à mon effroi, j’entendis dire qu’il devait y avoir un bal à Saint-Louis, dans l’unique petite auberge à laquelle nous nous rendions. Mon imagination me représentait que je n’allais avoir ni solitude, ni paix, et pis que tout cela, je craignais que Jim n’eût une querelle et ne se servît de ses pistolets. Lui, était ennuyé pour une autre raison. Il avait rêvé, la nuit précédente, qu’il assistait à un bal, où il tuait un homme qui faisait « une remarque désagréable ». Pendant les trois derniers milles parcourus après le coucher du soleil, il faisait extrêmement froid, mais rien ne pouvait égaler la beauté du crépuscule et l’aspect étrange des plaines de neige ondulées sur lesquelles il s’étendait. Lorsque nous arrivâmes à la bizarre petite demeure où, à Saint-Louis, on « loge les étrangers », on fut très-poli, et l’on nous dit qu’après le souper nous aurions la cuisine à nous seuls. Je trouvai là une grosse veuve affairée, compétente, vigoureuse, capable de diriger et les hommes et tout le reste, et, aussi florissante qu’elle, sa sœur, coiffée d’un énorme chignon. Il y avait en outre, dans la cuisine, deux méchants enfants pleu-