Page:Bird - Voyage d’une femme aux Montagnes Rocheuses, 1888.pdf/34

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
26
VOYAGE D’UNE FEMME

leil, nous courions vers le grand lac Salé, borné par les chaînes blanches du Whasatch. Le long de ses rives, l’industrie mormonne a, au moyen d’irrigations, forcé le sol à rendre de belles récoltes de foin et d’orge. Nous dépassons quelques huttes d’où sortaient, même à cette heure matinale, des Mormons accompagnés chacun de deux ou trois femmes, se rendant à leur travail. Ces femmes étaient laides, et leurs vêtements bleus, sans forme, hideux. À la ville mormonne d’Ogden, nous avons changé de train et traversé de nouveau des plaines poudreuses, blanches et étincelantes, variées par de violents cours d’eau boueux et des vallées arides se rétrécissant de temps à autre pour former des canyons[1]. D’un commun accord, on tint les fenêtres fermées, afin d’éviter la fine poussière blanche alcaline, si irritante pour les narines. Le voyage devint plus en plus fastidieux, à mesure que nous gravissions rapidement des plaines immenses et des déserts de sable, qui n’étaient même pas bornés par des montagnes ; une butte, çà et là, rompait seule la monotonie. Les marques de roues sur le chemin de l’Utah étaient souvent parallèles à la voie du chemin de fer et des ossements de bœufs blanchissaient au soleil, restes de ceux dont les cadavres tombèrent au désert dans leur aride et long voyage. Les premiers rayons du soleil nous trouvèrent, aujourd’hui dimanche, frissonnant au fort Laramie, poste de frontière tristement situé à une hauteur de 7 000 pieds. — Mille pieds de plus, sur des terrains poudreux, nous ont amenés à « Sherman », le point

  1. Ravins.