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LÉON TOLSTOÏ

tre côté, et Féodor Ivanitch nous étonnait par sa force en inclinant les branches les plus grosses. Et nous ramassions de tous côtés, et, malgré cela, il restait toujours des noisettes que nous n’avions pas vues et que nous apercevions quand Féodor Ivanitch abandonnait les branches qui se relevaient lentement. Je me rappelle comment il faisait chaud dans le bosquet et quelle agréable fraîcheur il y avait à l’ombre ; je me rappelle l’odeur forte du feuillage des noisetiers, les craquements fréquents des noisettes cassées par les femmes de chambre qui étaient avec nous, et je me rappelle que nous mâchions sans cesse les noisettes fraîches, blanches.

« On en mettait dans les poches, dans les jupes, dans le cabriolet, et grand’mère les prenait et nous félicitait. Qu’arriva-t-il une fois de retour à la maison, je ne m’en souviens pas. Je me rappelle seulement ma grand’mère, le bosquet de noisetiers, l’odeur forte du feuillage, les noisettes, les valets, le cabriolet jaune, le soleil, tout cela s’unissant en une impression joyeuse. De même qu’il me semblait que grand’mère seule pouvait faire des bulles de savon, de même je ne me représentais pas le bosquet, les noisettes et le soleil sans grand’mère dans le cabriolet jaune tiré par Pétrouchka et Matuchka.

« Mais l’impression la plus forte liée à ma grand’mère, c’est la nuit passée dans sa chambre à coucher, et Léon Stépanitch.

« Léon Stépanitch était un conteur aveugle (il était