Page:Biriukov - Léon Tolstoï, vie et oeuvre 2.djvu/102

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
86
LÉON TOLSTOÏ

Aussitôt à Iasnaia Poliana, il se donne tout entier à l’exploitation agricole.

Dans son journal de ce temps, nous trouvons entre autres la note suivante :

« Voici comment, en route, j’ai limité mes occupations : le principal, c’est le travail littéraire ; ensuite les devoirs de famille ; ensuite l’exploitation. Mais l’exploitation je devais la laisser sur les bras du starosta. J’ai tâché de l’adoucir, de l’améliorer, de me contenter de deux mille roubles par an et d’employer le reste pour les paysans.

« Mon principal écueil, c’est l’ambition du libéralisme. Il faudrait vivre pour soi : une bonne action par jour, c’est assez. »

Un peu plus tard il écrit :

« Le sacrifice ne consiste pas à dire : prenez de moi ce que vous voulez ; mais il faut travailler, penser, combiner, pour se donner tout entier. »

Il consacra le mois d’août à la lecture et lut deux œuvres remarquables : l’Iliade et l’Évangile ; et toutes deux firent sur lui une grande impression.

« J’ai terminé la fin inimaginablement belle de l’Iliade », s’exprimait-il, et la beauté de ces deux œuvres lui font regretter qu’il n’y ait point de lien entre elles. « Comment Homère a-t-il pu ignorer que la bonté c’est l’amour ? » se dit-il en comparant en pensée ces deux livres. Et il se répond à lui-même : «La révélation est la meilleure explication. »

Au milieu d’octobre Tolstoï s’installa à Moscou avec son frère Nicolas et sa sœur Marie. Par son