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Page:Biriukov - Léon Tolstoï, vie et oeuvre 3.djvu/121

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VIE ET ŒUVRE

les erreurs de l’humanité. Déjà je sentais vaguement que la peine de mort, le meurtre réfléchi, est absolument contraire à la loi chrétienne que soi-disant nous professons, qu’elle rend impossible la vie raisonnable, et toute moralité. En effet, si un homme, ou une réunion d’hommes, peut décider qu’il est nécessaire de tuer un homme ou plusieurs, il n’y a aucune raison pour que d’autres hommes ne trouvent pas la même nécessité au meurtre de certains autres individus. Alors j’ai senti vaguement que la justification du meurtre par l’Église et la Science, au lieu d’atteindre son but, dévoile au contraire le mensonge de l’Église et le mensonge de la Science. J’avais senti cela pour la première fois à Paris, devant une exécution capitale. Je le sentis beaucoup plus nettement quand je pris part à l’affaire Chibounine. Mais il m’était terrible de me fier à moi-même et de me séparer de tous. Ce ne fut que beaucoup plus tard que s’imposa à moi la nécessité de me fier à mes propres sentiments et de nier ces mensonges terribles qui tiennent en leur pouvoir les hommes de notre époque et engendrent tous les maux dont souffre l’humanité : le mensonge de l’Église et le mensonge de la Science.

« Beaucoup plus tard seulement, quand je commençai à examiner pour quelles raisons l’Église et la Science cherchent à justifier l’existence de l’État, je me rendis compte des tromperies grossières par lesquelles l’Église et la Science cachent aux hommes les crimes de l’État. Je trouvai ces raisonnements dans les catéchismes et les livres scientifiques répandus en millions d’exemplaires et qui