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Page:Biriukov - Léon Tolstoï, vie et oeuvre 3.djvu/190

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LÉON TOLSTOÏ

« Jusqu’à présent, je ne travaille pas. Je me suis entouré d’ouvrages sur Pierre et son époque. Je lis, je note et tâche d’écrire, mais je ne le puis pas. Mais quelle merveilleuse époque pour un artiste ! Quoi qu’on regarde, partout des problèmes, des mystères, que la poésie seule peut dévoiler. C’est là qu’est le nœud de toute la vie russe… Il me semble que rien ne sortira de mes préparatifs ; ils durent trop longtemps, et je m’émeus trop. D’ailleurs, je n’en serai pas triste[1]. »

Au mois de mars 1878, la comtesse écrit encore à sa sœur sur ce même sujet :

« Tous les personnages de l’époque de Pierre le Grand sont prêts, habillés, parés, mis à leur place, mais ils ne respirent pas encore. Hier je le lui ai dit. Il en a convenu. Peut-être vont-ils se mouvoir, se mettre à vivre, mais ce n’est pas encore[2]. »

Et dans le carnet de Tolstoï nous trouvons quelques notes précieuses pour l’histoire et la psychologie de cette création.

D’abord l’esquisse d’un tableau printanier. « Le printemps. Le soir. À l’horizon des nuages bas, sombres, déchiquetés. Calme, humide, sombre, parfumé, lumière lilas, le bétail, la porte… les flocons de poil hivernal, les feuilles de bouleaux molles comme chiffe. Touffes bleues de myosotis… abeilles, bourdonnements ; primevères jaunes… Sur l’herbe, dans la rosée, le spectre solaire. Chant du rossignol, le coucou… Les routes sont encore peu tracées. Bruit des ruisseaux grossis… Orion et Sirius en déclin.

  1. Archives de V. G. Tchertkov.
  2. Archives de T. A. Kouzminsky.