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Page:Biriukov - Léon Tolstoï, vie et oeuvre 3.djvu/205

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VIE ET ŒUVRE

quelconque et la décrivait, tous seraient ravis. Si banal que ce soit, mais en tout, dans la vie, il ne faut qu’une chose, une qualité négative : ne pas mentir. Dans la vie le mensonge est vilain, mais il ne détruit pas la vie, car, malgré lui, la vérité reste ! Mais dans l’art, le mensonge détruit tout ce qui lie les événements, et tout tombe en poussière[1]. »

Nous citerons aussi l’opinion de Tourgueniev, bien qu’il ne puisse pas compter parmi les amis littéraires de Tolstoï. Nous l’empruntons à sa correspondance privée. Dans une lettre adressée à A. S. Souvorine, le 14 mars 1875, Tourgueniev écrit :

« J’attends avec impatience le premier numéro de vos études. Votre « Portrait littéraire » de L. N. Tolstoï sera certainement très bien. C’est un talent hors ligne mais dans Anna Karénine il a fait fausse route. C’est l’influence de Moscou, de la noblesse slavophile, des vieilles filles orthodoxes, de son isolement et du manque de véritable travail artistique. »

Et au poète Polonski, il écrit :

« Anna Karénine ne me plaît pas, malgré des pages vraiment très belles (les courses, la fenaison, la chasse). Mais tout cela est aigre, sent Moscou, l’encens, les vieilles filles, le slavophilisme, les idées étroites de la noblesse. »

Il nous reste à passer rapidement en revue la critique professionnelle, si l’on peut s’exprimer ainsi, en faisant de nouveau remarquer, comme pour Guerre et Paix, que nous ne nous proposons pas d’étudier la critique d’Anna Karénine au point

  1. Archives de V. G. Tchertkov.