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Page:Biriukov - Léon Tolstoï, vie et oeuvre 3.djvu/281

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VIE ET ŒUVRE

vis que ces milliards d’hommes, à de très rares exceptions près, ne pouvaient entrer dans ma classification. Il m’était impossible de voir en eux des hommes ne comprenant pas la question, puisqu’ils la posent et y répondent avec une clarté extraordinaire. Je ne pouvais pas non plus les ranger parmi les épicuriens, puisque leur vie comporte plus de privations et de souffrances que de plaisirs. Encore moins pouvais-je les classer dans la catégorie de ceux qui, stupidement, mettent fin à leur vie insensée, puisqu’ils s’expliquent chaque acte de leur vie et la mort elle-même et regardent le suicide comme le mal le plus grand. Il en résultait que toute l’humanité avait une connaissance quelconque du sens de la vie, que je ne connaissais pas et méprisais. Il en résultait que la science raisonnée ne donnait pas le sens de la vie, mais excluait la vie, et que le sens attribué à la vie par des milliards d’hommes, par toute l’humanité, était basé sur une science quelconque, mensongère et méprisable ».

Mais cette religion qui donne au peuple le sens de la vie est en contradiction avec la raison ; elle suppose la foi aveugle, et Tolstoï avait besoin d’une religion consciente. Alors il se met à étudier les diverses religions. Le christianisme répond le mieux aux besoins de son âme. Il s’y arrête longuement, étudie les diverses formes du christianisme, et de nouveau il remarque que, quand il étudie la religion parmi les gens de son milieu, il perd l’espoir de trouver la réponse à la question du sens de la vie. La religion pour les classes supérieures n’est qu’une consolation épicurienne.

Il se retourne de nouveau vers le peuple et voit