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Page:Biriukov - Léon Tolstoï, vie et oeuvre 3.djvu/407

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VIE ET ŒUVRE

d’embrasser fortement vous et les vôtres. Je n’en puis plus. Je suis fatigué. »

Cette lettre de Tourgueniev est la dernière qui nous soit connue. Elle arriva au commencement de juillet, quand Tolstoï faisait encore sa cure de koumiss.

Pour Tolstoï, la question de retourner ou non à la littérature n’existait pas, ou était beaucoup plus profonde et plus large. C’est pourquoi, trouvant à son retour la lettre de Tourgueniev, il n’y pouvait répondre immédiatement. Il lui eût fallu narrer toutes les souffrances par lesquelles il était arrivé à sa conception actuelle et que Tourgueniev connaissait, mais ne voulait ou ne pouvait comprendre.

En septembre, la famille de Tolstoï retourna à Moscou et lui resta seul à Iasnaïa. À quelque temps de là, il reçut l’avis qu’il était nommé juré à Krapivna pour la prochaine session des assises. Et il se résolut à accomplir un acte très important : refuser d’être juré. Mais il ne parla de cette intention à aucun de ses familiers, il craignait que leur émoi ne le troublât au moment décisif. Mais quand l’acte fut accompli, il en informa la comtesse, dans une de ses lettres :

« Je reviens de Krapivna. J’y suis allé étant appelé à siéger à la cour d’assises. Je suis arrivé à deux heures passées. La séance était déjà commencée ; et l’on m’infligea une amende de 100 roubles. Quand on m’appela, je répondis que je ne pouvais pas être juré. Ou me demanda pourquoi ? Je répondis ; par convictions religieuses. On me demanda ensuite si je refuserais décidément, j’ai répondu que je ne pouvais pas accepter, et suis