Page:Bishop - En canot de papier de Québec au golfe du Mexique, traduction Hephell, Plon, 1879.djvu/247

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
205
chapitre onzième.

qui avons été élevés dans des sentiments religieux depuis notre enfance, faisons-nous plus que cela ? Aimons-nous notre prochain comme nous-mêmes ? Je voyageai pendant vingt milles (renseignement local), en descendant la rivière, sans avoir vu un être humain ou une habitation, jusqu’au pont et à la maison de Stanley. À partir de ce point, je pressai ma marche pendant trente-cinq milles, et après avoir passé devant un champ autrefois cultivé sur une colline, les ténèbres s’étendirent sur les marais, et un brouillard épais, s’élevant au-dessus des eaux, enveloppa la forêt dans ses replis. Ne trouvant pas le moindre indice de terre au-dessus du niveau de l’eau, je cherchai mon chemin au hasard, au milieu des brèches dans la terre inondée, pour finir par y perdre mon canot au milieu des broussailles. Il m’était impossible d’aller plus loin, et je me préparais à monter sur les branches d’un arbre gigantesque, m’étant pourvu dune corde mince pour m’assurer dans une position immobile et sûre, lorsqu’un cri long et sourd éveilla mon attention.

« Ouaho ! ho ! ho ! petits, petits », retentissaient dans l’air épais et calme ; ce n’était ni le cri de la chouette ni celui du renard. C’était la voix d’un cracker rappelant ses porcs dans la forêt. Ces cris étaient en vérité fort agréables à entendre, car ils m’indiquaient que les hautes terres étaient tout près, et qu’un bon feu attendait mon corps engourdi dans la cabane de cet inconnu. Poussant le canot dans la direction du Sound, et sondant avec ma pagaie le bord inondé du marais, je descendis à terre et cherchai ma route en suivant un sen-