Page:Bishop - En canot de papier de Québec au golfe du Mexique, traduction Hephell, Plon, 1879.djvu/346

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
302
EN CANOT DE PAPIER.

beaucoup de villes autrefois prospères sont, à l’heure qu’il est, tombées en décadence.

Les scieries à vapeur et le village Ellaville sont situés vis-à-vis la ville de Colombus ; le commerce du bois est le plus important qui existe entre ce point et Cedar-Cayes. Cette rivière si renommée, vers laquelle le cœur du troubadeur nègre « se tourne toujours », est un cours d’eau sauvage et étrange ; même dans les temps les plus prospères, il n’y avait que peu de plantations sur ses rives. Les animaux sauvages erraient dans les grandes forêts, et d’affreux reptiles infestaient la vase des marais. C’est une région faite pour plaire au chasseur et au bûcheron, au naturaliste et au canotier.

Mais la majorité des habitants préféreraient, j’en suis sûr, entendre chanter les beautés de ce pays par Christine Nilsson plutôt que de descendre en personne le Suwanee.

Le lundi 22 mars, MM. Nason, Purviance et Henderson vinrent me rejoindre. Ils s’étaient procuré dans le Nord un bateau pour la pêche aux aloses, qu’on avait transporté par chemin de fer depuis Savannah. Il était gréé en sloop, et son avant avait été ponté, en sorte que ces touristes enthousiastes possédaient un abri contre la pluie, pour leurs provisions et leurs couvertures. Avec le fort courant de la rivière, une paire de longues rames et une voile, les passagers du shad-boat pouvaient naviguer facilement et rapidement jusqu’au golfe ; tandis que mon petit bateau, léger comme l’écume sur l’eau, ne demandait qu’à sentir l’aviron pour aller de l’avant.