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ET VENGEANCES


— « Bourreau, décapite ma femme. »

— « Bourreau, mon ami, dit la reine, prends ton coutelas le mieux affilé, et gagne vite ton argent. J’ai perdu l’amitié du roi. Mes deux pauvres petits jumeaux sont morts, noyés dans la mer grande. Maintenant, ils sont en paradis. Tout-à-l’heure, je les y retrouverai pour toujours.

— Ah ! tu veux mourir, dit le roi. Eh bien ! tu ne mourras pas. Pour toi, l’enfer va commencer sur la terre. Je veux être damné, sans rémission, si jamais femme a pâti comme je vais te faire souffrir. — Valets, je renie cette femme. Prenez-lui ses bagues et ses pendants d’oreille. Ôtez-lui sa belle robe, et donnez-lui un mauvais cotillon troué. J’entends que, dorénavant, elle vienne, sous ma table, se nourrir, avec mes chiens, des restes de mon dîner et de mon souper. »

Les valets obéirent, et la pauvre reine se soumit comme une sainte. Alors, la mère du roi fut bien contente, car elle haïssait sa bru de tout son cœur.

Pourtant, le Bon Dieu et la sainte Vierge Marie avaient pris pitié des deux pauvres petits jumeaux, que le marinier avait jetés dans la mer grande. Pendant trois jours et trois nuits, le berceau nagea, jusqu’à ce que la mer grande le poussât vers la terre, tout proche de la maisonnette d’un pêcheur. La femme du pêcheur em-