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Page:Bladé - Contes populaires de la Gascogne, t. 3, 1886.djvu/101

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Les gens avisés

— « Bonjour, Monseigneur. J’ai changé d’avis. Si vous voulez toujours Grain-de-Millet pour cocher, comptez-moi mille pistoles. »

Sans marchander, l’évêque de Lectoure paya comptant, et le père s’en revint à Lacouture.

Pendant toute une semaine, Grain-de-Millet montra ce dont il était capable. Jamais les chevaux de l’évêque de Lectoure n’avaient été si bien pansés, étrillés, harnachés. Jamais sa voiture n’avait été si propre, si bien attelée. Jamais, au grand jamais, cocher n’avait conduit comme Grain-de-Millet.

L’évêque de Lectoure était bien content. Mais il y a une fin à tout.

Le matin du huitième jour, Grain-de-Millet criait, dans l’écurie, comme un homme écorché vif :

— « Aie ! aie ! aie ! Je suis mort. Aie ! aie ! aie ! Je suis mort.

— Qu’as-tu, Grain-de-Millet ? Qu’as-tu ?

— Aie ! aie ! aie ! Je suis mort. Un cheval m’a broyé sous son pied. Aie ! aie ! aie ! Je suis mort.

— Montre-toi, Grain-de-Millet. Montre-toi, tandis qu’on va chercher le chirurgien. »

Mais Grain-de-Millet ne se montrait pas, et ne criait plus. Alors, l’évêque de Lectoure pensa :

— « Grain-de-Millet est mort. J’ai payé cher ses bons services d’une semaine. »