Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/223

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après l’avoir promené en criant vengeance ; l’obscurité s’épaississant de plus en plus sur la ville par le bris des réverbères ; des hommes parcourant la rue Richelieu les bras nus et la torche à la main… Ah ! les meneurs durent s’effrayer alors ; car où s’arrêterait le char qu’ils avaient lancé ? « Non, s’écriait avec force M. de Rémusat dans les bureaux du Globe, non, ce n’est pas une révolution que nous avons prétendu faire : il s’agissait uniquement d’une résistance légale. » — Ces paroles ayant été vivement relevées par le docteur Paulin, un débat violent s’engage ; des exclamations menaçantes font craindre une lutte plus sérieuse.

M. de Rémusat, pourtant, avait fait preuve d’une honorable fermeté, tant qu’il ne s’était agi que d’une résistance constitutionnelle. Mais il s’alarmait de tout ce qui, alors, pouvait être osé.

Car tous ces bourgeois craignaient le peuple encore plus que la cour. « Songez-y bien, disait ce soir-là à ses amis du National un manufacturier du faubourg Saint-Marceau, si vous donnez des armes aux ouvriers, ils se battront ; si vous ne leur en donnez pas, ils voleront. »

On ne leur en donna point, ils en prirent, ne volèrent pas, et ne songèrent qu’à combattre.

Cependant quelques citoyens, parmi lesquels MM. Thiers, Cauchois-Lemaire, Chevallier, Bastide, Dupont, discutaient chez M. Cadet-Gassicourt les moyens de régulariser la résistance. La maison était située dans la rue Saint-Honoré : on y délibérait au bruit de la fusillade, et il y régnait plus de confusion que d’ardeur. La nécessité de recourir aux for-