Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/240

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paille semée sur les dalles. Ils descendent, et sont renfermés dans l’église. Deux heures après, un autre détachement accourut, et les mit en liberté. Les soldats qui venaient de se battre à la Madeleine et dans les environs, avaient versé du sang, et ils en avaient perdu. Leur situation était douloureuse, leur tristesse profonde. Et pourtant, quand sonna l’heure de leur repas ordinaire, on les entendit se répandre en plaisanteries sur la surprise et l’impatience de leurs cuisiniers, restés à Saint-Denis. Voilà ce qu’était cette guerre. Le rire y fut continuellement à côté des larmes. Tantôt généreuse et courtoise, tantôt implacable ; ici grave comme sur un champ de bataille là bouffonne comme sur des tréteaux, elle mit en relief dans tout son éclat, mais aussi dans toute sa mobilité, le génie de notre nation.

Au sein de cette immense et confuse mêlée, la plupart des officiers de la garde crurent devoir rester inviolablement fidèles à leur drapeau. Quelques-uns, tels que M. Lemotheux, écrivirent leur démission, bien résolus a ne la notifier qu’après le combat. D’autres comprirent leur devoir d’une manière différente. M. le comte Raoul de la Tour-du-Pin, par exemple, adressa au prince de Polignac la lettre suivante :

« Monseigneur,

Après une journée de massacres et de désastres, entreprise contre toutes les lois divines et humaines et à laquelle je n’ai pris part que par un respect humain que je me reproche, ma conscience me défend impérieusement de servir un moment de plus. J’ai donné dans ma vie d’assez