Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/262

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les, que le général Vincent lui apportait. « Les Parisiens sont dans l’anarchie, lui dit-il, l’anarchie les ramènera nécessairement à mes pieds. » Semblable en cela à tous les princes, Charles X ne croyait guère qu’au dévouement de ceux qui consentaient à entrer dans ses illusions. Or, comme en un tel moment, on ne pouvait les caresser sans le trahir, les courtisans le trahissaient dans la crainte de lui déplaire.

Au reste, à mesure que les heures s’écoulaient, l’anxiété des hommes de transaction devenait plus vive. Casimir Périer, surtout, se montrait saisi d’épouvante. Il avait dit à M. Alexandre de Girardin, dans la matinée du 28 : « Ce qui convient le mieux à la France, ce sont les Bourbons sans les ultra. » Et en effet, il ne songeait alors qu’à garantir le trône de Charles X. D’accord avec lui, M. Alexandre de Girardin courut à Saint-Cloud presser le monarque de rapporter les ordonnances.

Une sourde agitation s’était répandue dans la demeure royale. Personne n’y était à son poste ; le service du château était presqu’entièrement interrompu et les gens de la haute domesticité s’esquivaient l’un après l’autre. Toutefois, chez les courtisans les plus exercés, l’inquiétude était tempérée par la crainte d’offenser le maître ; quelques-uns même se montraient pleins de confiance, par un raffinement d’adulation que dénonçait leur pâleur.

Dans la matinée, Mme de Gontaut traversa en courant la salle des gardes ; elle se dirigeait vers l’appartement de Charles X, et, cachant à demi son visage dans ses mains, elle s’écriait : « Sauvez le roi,