Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/407

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Paris avait soudainement changé de physionomie. Les magasins se rouvraient, les affaires tendaient à reprendre leur cours. Un des derniers actes de la commission municipale fut de proroger de dix jours l’échéance des effets de commerce. La suspension de toutes les relations commerciales, qui avait été pour quelques-uns une cause réelle de ruine, fut pour d’autres un prétexte d’improbité. En agitant les sociétés, on fait toujours monter un peu de limon à la surface.

Le 31, à cinq heures du matin, Charles X arriva à Trianon. Le dauphin était resté à Saint-Cloud, qu’il ne quitta qu’à midi. Mais, avant de partir, il voulut tenter un dernier effort. Une compagnie était postée à une extrémité du pont de Sèvres, et de l’extrémité opposée partaient de nombreux coups de fusil. Sur l’ordre du Dauphin, le duc de Lévis se rend auprès des troupes pour les engager à la résistance. Le chef de bataillon, qui les commandait, était immobile à la tête du pont, les bras croisés sur sur sa poitrine, et comme livré à une méditation profonde. Le duc de Lévis lui adresse la parole : c’est en vain. Instruit de cette scène, le Dauphin arrive au galop, et se met à haranguer les troupes. Pas un mouvement, pas un cri. Désespéré, il pousse son cheval sur le pont, mais voyant qu’il n’est pas suivi, il regagne Saint-Cloud, partagé entre la colère et la honte.

La compagnie dont le Dauphin venait d’interroger le zèle, était commandée par M. Quartery. Sa défection livra au peuple une pièce de canon et le pont de Sèvres.