Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/74

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mouraient victimes des Cent-Jours. Napoléon avait fait fusiller le duc d’Enghien dans les fossés de Vincennes : Louis XVIII rendait à Napoléon assassinat pour assassinat ; genre d’émulation bien digne des maîtres de la terre ! Mais c’est tout. Le lendemain de la révolution de juillet, alors qu’elle était toute puissante, la bourgeoisie a-t-elle imposé à son roi la réhabilitation de Ney ? et pourquoi ne l’a-t-elle pas fait[1] ?

J’arrive à un autre point l’intérêt des acquéreurs de biens nationaux. La question était plus grave pour la bourgeoisie ; car ce n’était plus seulement une affaire de sentiment et d’humanité.

  1. Au moment même où j’écris ces lignes, aujourd’hui 7 mars 1841, les journaux annoncent la détermination que le fils du maréchal Ney vient de prendre de siéger dans cette assemblée qui vota, presqu’à l’unanimité, la mort de son père. Dans la lettre explicative des motifs de cette résolution, je lis :

    « Le fils du marquis de Strafford ne siégea à la chambre des lords qu’après avoir obtenu la révocation de l’arrêt qui avait condamné injustement son père sous le règne de Charles Ier.

    Moins heureux que lui ou moins bien servi par les circonstances et l’état de nos lois, je n’ai pu complétement réussir dans l’accomplissèment d’un devoir religieux que j’ai poursuivi n’anmoins sans relâche et par tous les moyens en mon pouvoir depuis 1831.

    Mes efforts auprès des différents ministères qui se sont succédé pendant cet espace de temps ont toujours échoué devant des fins de non-recevoir tirées soit des lacunes de notre Code en matière de révision, soit aussi des inconvénients que présenterait pour la sûreté publique l’évocation de certains souvenirs que les passions ne manqueraient pas de saisir…

    Que vous dirai-je ? je combats ainsi sans succès depuis dix ans ! »

    Voilà ce que réservait à la mémoire du maréchal Ney le gouvernement de la bourgeoisie !