Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/78

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se crut un grand homme d’état pour avoir fait déclarer une telle pairie héréditaire ! Quelle pauvreté de vues ! Le fils de lord Chesterfeald partant pour visiter les diverses cours de l’Europe, son père lui dit : « Allez, mon fils, allez voir par quels hommes le monde est gouverné. » Je conçois ce dédain.

oui, le gouvernement de la Restauration n’était pas encore à l’œuvre que déjà le fait dominant de la situation était la nécessaire rivalité de ses deux pouvoirs : la royauté et la chambre. Et voyez quelles circonstances annoncent, préparent la lutte ! Quand les élections commencent, deux hommes se partagent le pouvoir ministériel, Talleyrand et Fouché : celui-ci, habile, pénétrant, rompu à l’intrigue, possédant la confiance de la bourgeoisie et versé dans l’art de manier les ressorts impurs ; l’autre, aussi dépourvu de valeur intellectuelle que de valeur morale, mais passant pour un grand seigneur sans préjugés, et jouissant d’une immense réputation d’homme d’état, parce que la bassesse à ses triomphes, que tout esprit vulgaire confond avec ceux de l’habileté. Entre ces deux hommes l’antagonisme est flagrant ; chacun le voit, chacun le dit, et il semble que ce soit là l’écueil contre lequel se brisera le ministère. Eh bien ! non : il va se dissoudre, mais sa dissolution sera le premier témoignage de la puissance des intérêts bourgeois et de la force irrésistible du principe électif.

Ce qui avait rendu Fouché un ministre nécessaire,