Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/271

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battu toute la matinée à Bialolenka, a trompé la vieille expérience de Krukowiecki, lui a masqué ses manœuvres, et, lui laissant son arrière-garde pour occuper ses triomphes, il a enfin opéré sa jonction avec Diébitch. Entouré, foudroyé par une batterie de 40 pièces qui le prend d’écharpe, Skrzynecki bat en retraite et abandonne le bois. Diébitch appelle alors ses 15, 000 hommes de cavalerie, qui s’élancent dans la plaine, poussant devant eux 58 pièces volantes. On distingue dans la masse les fameux cuirassiers du prince Albert, les mêmes qui, en 1814, étaient entrés dans Paris en tête des alliés. L’infanterie polonaise s’est reformée et présente un nouveau front qui demeure impénétrable aux hulans ; mais chargée par une nuée de hussards, la division Szembec fléchit et se replie en bon ordre sur Praga, pendant qu’un bataillon de recrues s’enfuit lâchement sur les glaces de la Vistule, et va porter la terreur dans Varsovie. En ce moment tous les yeux se tournent vers le nord, on s’attend à voir venir la division de Krukowiecki victorieuse à Bialolenka : Krukowiecki reste immobile, comme Grouchy à Waterloo. Pour comble de malheur, les avenues de Praga sont encombrées ; les paysans effarés s’y pressent en foule ; les morts et les mourants sont entassés pêle-mêle ; toutes les issues sont obstruées par des équipages de luxe qui ont servi au transport des blessés et qu’inonde le sang plébéïen. Le désordre est immense, la nuit est venue, l’air est plein de fumée et retentit de gémissements. Pour démasquer les batteries de la tête du pont, Malachowski met le feu aux édifices de Praga, et les flammes de