Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/36

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de toutes les nations opprimées. La noblesse du but se confondait ici avec l’importance matérielle du résultat ; et il y avait à vouloir rassurer les rois de l’Europe, à les craindre, non-seulement égoïsme, mais puérilité, petitesse de vues et débilité d’esprit.

Et puis, rien n’était préparé à l’intérieur pour les vastes réformes et les hautes entreprises. Il fallait donc trouver au dehors une issue à cette exubérance de vie que la révolution venait de créer dans la société française. Fermer à tant de passions inoccupées la carrière utile et glorieuse que leur ouvrait le destin, c’était les réduire à user en complots et en agitations une activité sans aliment. Il n’y avait que des hommes profondément médiocres qui pussent ne pas comprendre qu’éviter à tout prix la guerre étrangère, c’était préparer les éléments d’une guerre civile. Le sceptre nous était offert et, pour le repousser, il pouvait nous en coûter beaucoup plus que pour le saisir.

Mais trois choses s’opposaient à l’adoption d’une forte politique : la forme de gouvernement adoptée, le caractère personnel du nouveau roi, les instincts et les intérêts de la classe dominante.

Pour qu’un gouvernement agisse puissamment au dehors, il faut qu’au dedans son action soit libre. Il n’est donné qu’aux aristocraties bien assises, comme l’aristocratie anglaise, ou aux royautés absolues, comme celle de Louis XIV, ou aux démocraties vigoureusement constituées, comme celle de la Convention, de concevoir et de mener à fin de grandes entreprises. La monarchie représentative, telle qu’on