Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/13

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mieux que ses victoires, témoigna de la grandeur de sa mission terrestre. Ce n’était donc pas les qualités de l’homme politique qui faisaient faute à M. de Chateaubriand ; c’étaient celles de l’homme de parti, car rien n’égale l’égoïsme des partis, si ce n’est leur ingratitude. Ceux que leurs passions choisissent pour chefs, ils les veulent pour esclaves ; et quand on croit qu’ils se donnent, ils s’imposent. Les partisans les plus obstinés de l’ancienne monarchie ne pouvaient pardonner à M. de Chateaubriand d’avoir été un moment ébloui par la gloire de Bonaparte, et d’avoir attendu, pour s’armer contre lui d’un ressentiment immortel, le meurtre du duc d’Enghien ; ils ne pouvaient lui pardonner la presse défendue et la révolution de juillet admirée. Ainsi, on reprochait à un homme dont l’imagination était portée au merveilleux, dont la nature était riche et complexe, dont l’âme s’ouvrait aisément à toutes les nobles impressions, de n’être pas resté insensible aux fascinations de la gloire et aux pompes de la liberté ! Mais, encore une fois, les partis ont leur despotisme qu’on ne brave pas impunément ; il faut, pour les conduire, au défaut d’une ambition servile, un fanatisme ignorant et aveugle. Si on cherche à les éclairer, on les éloigne ; si on leur demande d’être justes, on leur devient suspect ; si on les sert malgré eux, on les irrite. Telles étaient les causes générales qui reléguaient M. de Chateaubriand dans une oisiveté nécessaire. Triste siècle que celui où l’on est forcé d’expliquer le. silence du génie et l’impuissance de la force !

Quant à M. Berryer, quel parti ne se serait glo-