Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/199

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chaînée, ni les égards du roi lui-même, forcé de subir en silence l’injure de son dévouement. Ainsi martyr de son orgueil, il lui arriva souvent de donner à ceux qui l’approchaient des spectacles singuliers et terribles. Une nuit, mandé par lui secrètement, M. le docteur De Laberge accourt au ministère de l’intérieur. Casimir Périer était au lit. Des bougies brûlaient dans l’appartement du ministre et éclairaient son visage, profondément altéré. « Lisez, dit-il à M. De Laberge, en lui tendant un cahier ; voici ma réponse aux attaques dirigées hier contre moi par M. Laffitte. Lisez, et donnez-moi votre avis. » M. De Laberge trouva le discours empreint d’une animosité blâmable, s’en expliqua franchement, et fut prié par le ministre d’adoucir ce que pouvaient avoir de trop acerbe des expressions échappées à la colère. Tout-à-coup, la porte s’ouvre, un officier de dragons paraît, apportant une lettre du roi. Casimir Périer saisit la lettre, la lit rapidement, la froisse, la roule entré ses mains, et la jetant loin de lui avec violence : « il n’y a pas de réponse, crie-t-il à l’officier, qui se retire interdit. — On croit le président du conseil fou, dit M. De Laberge ; Voici un homme qui pourra le certifier. » Casimir Périer ne s’offensa point de la rudesse de ces paroles, et se tournant vers M. De Laberge, dont il honorait le patriotisme et la franchise : « Si vous saviez ce que contient cette lettre ! Ramassez-la, et lisez. – Dieu m’en garde ! répondit le docteur, qui connaissait l’esprit soupçonneux du ministre ; dans l’état d’irritation où vous êtes, vous pourriez confier ce secret à d’autres, et m’en imputer