Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/213

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ministère. Les passions étaient vivement excitées, et la lutte qui s’engagea fut terrible. Dans un discours plein d’émotion et de fermeté, Garnier-Pagès repoussa le blâme dont on osait frapper une ville qu’on avait ensanglantée ; il demanda si les sommations avaient été faites, et déclara que, dans le cas contraire, des citoyens ayant été égorgés… à ces mots, il s’élève des clameurs ; Casimir Périer s’emporte et bondit sur son banc ; toute l’assemblée s’agite en sens divers. Mais Garnier-Pagès, reprenant : « oui, dit-il s’il n’y a pas eu de sommations préalables, nul doute que le petit nombre d’hommes qui ont porté les armes contre des citoyens, les ont égorgés. » Une longue interruption succède à ces déclarations énergiques.

M. Dupin aîné prend ensuite la parole. Il s’étonne que l’émeute trouve jusque dans le sein du parlement des défenseurs et des apologistes. Insultés, attaqués, sur le point de se voir désarmés, les soldats pouvaient-ils ne pas se défendre ? Et quels étaient les hommes dont on plaidait si chaleureusement la cause, au profit de qui on lançait sans preuves contre le gouvernement une accusation atroce ? C’étaient des hommes qui, dans une criminelle mascarade, avaient figuré l’assassinat du roi ; c’étaient des factieux réunis comme par miracle, comme par un coup de sifflet. Et on appelait population une escouade qui s’était jetée entre la garde nationale et la troupe ! M. Dupin finissait en exprimant l’espoir que le jury ne se laisserait pas intimider, que la cour royale de Grenoble vengerait la société offensée, et qu’on rendrait justice à la justice,