Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/23

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se rapprochent de lui par le besoin d’être protégés. « Mort aux brigands ! » tel est le mot d’ordre de tous les bourgeois, saisis d’épouvante et de colère ; et en effet, tous les chouans qu’on peut surprendre, on les égorge, sanglantes exécutions, dont des représailles, plus sanglantes encore, viennent augmenter l’horreur ! C’en est fait : les passions sont de toutes parts déchaînées, on entre dans la guerre civile.

Ce fut dans ces circonstances funestes que la duchesse de Berri résolut de quitter l’Ecosse et de venir animer par sa présence les partisans de son fils. il y avait là certainement une pensée impie. Car enfin, ce n’était ni pour accomplir quelque vaste projet de rénovation sociale, ni même pour améliorer par quelques réformes le sort des peuple, que Marie-Caroline s’élançait dans la carrière des conspirations et elle aurait pu se demander s’il était bien juste d’aller plonger la France dans un long deuil, sans autre but que de la rendre au duc de Bordeaux, comme on ferait d’un champ à son propriétaire dépossédé. Mais avec les préjugés dont on avait bercé son enfance, il était difficile que la duchesse de Berri comprit ce qu’il y avait de criminel en son dessein. D’ailleurs, le rôle de Jeanne d’Albret souriait à son imagination napolitaine. Traverser les mers, à la tête de paladins fidèles ; arriver sur une terre de chevaliers, à travers les périls et les aventures d’un voyage inattendu ; passer, à la faveur de mille déguisements divers, au milieu de tant d’ennemis en éveil ; errer, mère courageuse et reine proscrite, de village en village