Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/234

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demain : on annonçait que tel juré, tel défenseur, tel prévenu, était mort pendant la nuit. La confusion s’étant introduite aux municipalités, M. Taboureau, maître des requêtes, fut chargé de rétablir les tables négligées ; et, dans certains hôpitaux, l’affluence des moribonds devint si considérable, qu’on cessa de les inscrire on se contentait de marquer leur arrivée par des raies faites sur le mur.

Mais d’aussi grands maux ne furent pas sans trouver quelque adoucissement dans la charité publique. Les aliments substantiels ayant été indiqués comme préservatifs, le duc d’Orléans faisait distribuer, depuis trois mois, aux indigents, quatre ou cinq mille rations de riz par jour, si bien que, pour beaucoup de pauvres, l’approche du choléra avait presque été un bienfait ! Le choléra une fois entré à Paris, les actes de générosité se multiplièrent, par un phénomène assez nouveau dans les annales de la peste. Ainsi, dans cette ville où tant de luxe a coutume d’insulter à tant de misère, où l’on calomnie si volontiers la souffrance pour se dispenser de lui tendre la main, dans ce Paris sans âme, il y eut tout-à-coup je ne sais quel impétueux élan de philanthropie. Les bureaux de bienfaisance redoublèrent de sollicitude. Des souscriptions furent ouvertes partout et remplies avec empressement. La Manufacture des glaces de Saint-Gobain fit don à la capitale de 12,000 kilogrammes de chlorure. On put citer des traits touchants d’abnégation et de zèle. Le curé de Saint-Germain-l’Auxerrois, par exemple, vivait retiré à la campagne depuis la dévastation de son église ; à la