Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/241

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fut accusée à son tour, d’avoir excité l’émeute de Sainte-Pélagie, pour avoir occasion de l’étouffer dans le sang ; et de ces accusations, parties des deux camps, on ne saurait dire laquelle était la plus absurde, la plus inique.

Mais là ne se bornèrent pas les désordres. Le peuple, qui croyait aux empoisonnements, se mit à maudire les médecins. Il se rassemblait en tumulte à la porte des hôpitaux, et se répandait en plaintes ou en menaces. Un jour, on transportait un cholérique à l’Hôtel-Dieu, et la foule, en le voyant passer, se précipitait en tumulte. Le médecin qui accompagnait le malade, s’avance alors, soulève la couverture qui cachait la victime, et montrant au peuple, qui recule d’épouvante, cette face livide, ces yeux éteints, cette bouche béante : « Vous ne croyez pas au choléra ? s’écrie-t-il, eh bien voici, un cholérique. » Pour passer par de pareilles épreuves, il fallait une singulière force d’âme, mais le courage ne manqua pas aux médecins, dont la conduite fut en général digne d’éloge et quelquefois d’admiration. Exposés aux coups d’une colère aveugle, ils la bravèrent avec le même sang-froid qu’ils mettaient à affronter la maladie, et l’on en vit qui, pour éviter le risque d’être arrêtés et retardés dans leurs visites aux malades, traversèrent la ville en veste et en casquette, comme de simples ouvriers.

Malheureusement, les avis différaient d’une manière extraordinaire sur la nature du traitement à employer. M. Magendie prescrivait du punch dans une infusion de camomille. La base du traitement