Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/277

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et à trois heures du matin, la duchesse de Berri, Mlle Lebeschu, le maréchal Bourmont et son fils Adolphe, MM. de Saint-Priest, de Mesnard et de Brissac, se réunissaient sur le pont du Carlo-Alberto, à MM. de Kergorlay père et fils, Charles de Bourmont, Ledhuy, Sabatier et Sala.

Durant la traversée, la duchesse de Berri fut toujours calme, toujours souriante. Se souvenant trop bien de la lettre foudroyante de Charette sur la fuite du comte d’Artois en vue des côtes de Bretagne, elle était manifestement dominée par la pensée de laver les Bourbons de ce reproche de pusillanimité si souvent encouru par eux. C’était aussi la pensée de MM. de Bourmont, de Kergorlay et de Saint-Priest : ils sentaient bien qu’ici, à côté d’un trône à reconquérir, il y avait en quelque sorte une affaire d’honneur à vider ; mais ils ne se dissimulaient pas la gravité de l’entreprise, et ils avaient besoin, pour espérer, de croire aux promesses du hasard. M. Florian de Kergorlay, cependant, apportait beaucoup de confiance dans son dévouement, et il s’inquiétait de la réserve de quelques-uns de ses compagnons, réserve dans laquelle son impatience croyait voir le désir secret de faire échouer ou retarder l’aventure.

La traversée se fit sans encombre, grâce à l’aveuglement et à l’impéritie de la police de Paris. En vue d’Antibes, le Carlo-Alberto passa tout près d’un bâtiment de la croisière française, sans attirer son attention, et, après avoir traversé le golfe d’Hyères, il s’approcha tellement de Toulon que les passagers pouvaient compter les sabords des frégates en rade.