Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/32

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il est vrai que, parmi les meneurs de la bourgeoisie, quelques-uns, et notamment MM. Casimir Périer, Royer-Collard, Guizot, Thiers, n’adoptaient pas, au sujet de l’hérédité de la pairie, l’opinion générale ; mais leurs répugnances étaient trop inconséquentes pour avoir du crédit. Ils avouaient qu’on avait détruit avec raison le régime féodal : comment auraient-ils prouvé la nécessité de conserver le signe, eux qui souscrivaient à la destruction de la chose représentée ?

Quoi qu’il en soit, la révision de l’article 25 de la Charte, relatif à la constitution de la pairie, était de toutes parts réclamée avec empire, et l’anxiété était universelle. Le gouvernement dut se prononcer enfin, et Casimir Périer communiqua au parlement un projet de loi où, après avoir beaucoup insisté sur les avantages de l’hérédité, sur sa nécessité même, il concluait en ces termes : « Nous vous proposons de déclarer que la pairie cesse d’être héréditaire. »

Cette conclusion, précédée de considérations qui avaient pour but avoué de la combattre, ne faisait pas honneur au caractère de Casimir Périer ; elle montrait combien peu de courage véritable il y avait chez cet homme si hautain. Dédaigner les ovations populaires, lorsqu’on a pour dédommagement les flatteries de la classe la plus riche, la plus éclairée, la plus importante dans l’État, ce n’est là qu’un mince sacrifice et dont se montrent capables les natures les plus vulgaires ; mais le propre des âmes fortes est de résister, par amour pour le vrai, aux attraits de la popularité, quand c’est l’élite sup-