Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/343

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le château fut encombré, dans la soirée du même jour, par la foule des visiteurs. Chacun revenait de la campagne, chacun se désolait d’avoir manqué l’heure du dévouement.

Le lendemain, un calme profond régnait dans la plupart des quartiers de Paris ; toutes les boutiques y étaient ouvertes : les citoyens y vaquaient à leurs travaux accoutumés. Il y avait, toutefois, dans cette ville distraite, un point où se reconnaissaient les traces de la guerre civile, un point vers lequel couraient des mères en pleurs : la Morgue.

La résistance des insurgés de Saint-Méry avait été opiniâtre et presque inconcevable. Aussi, plusieurs ont-ils cru que le gouvernement l’avait favorisée, pour agrandir sa victoire, et rattacher plus étroitement à sa cause, par l’épouvante, la majorité de la bourgeoisie. Il est certain que deux traîtres combattaient dans les barricades. Mais outre que le calcul supposé est complétement invraisemblable à force d’atrocité et d’infamie, comment admettre que des hommes sensés eussent pu juger habile une aussi misérable combinaison ? Un gouvernement ne saurait être intéressé à faire croire que, pour mettre en question son existence, il suffit de cent hommes élevés par leur enthousiasme au-dessus des terreurs de la mort.

Quoi qu’il en soit, les ministres tirèrent parti de leur victoire avec une impatience farouche. Du sein des familles que l’insurrection venait de plonger dans le deuil, il s’échappait des cris de malédiction, triste encouragement aux rigueurs. Un mandat d’arrêt avait été lancé contre le rédacteur en chef