Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/349

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lement aux aspirations les plus louables, aux entraînements les plus généreux, l’envie, le goût du désordre, la haine des hommes injustes plutôt que celle de l’injustice, et, sous prétexte de détruire la tyrannie, l’espoir impatient de la déplacer. Un gouvernement républicain aurait donc eu tout à la fois la société à refondre, les partis à modérer, le peuple à satisfaire et à contenir, la classe opulente à soumettre sans la dépouiller, l’Europe à vaincre, l’Europe sur ses gardes, vigilante, armée. Or, pour suffire à une situation semblable, quelles étaient les forces du parti républicain ? Parti de minorité, il était en butte à des préventions, injustes pour la plupart, mais opiniâtres ; il se laissait plus volontiers gouverner par ses sentiments que par ses idées ; son chef nominal, M. de Lafayette, avait besoin et avait peur d’être dépassé ; et quant à ses véritables chefs, outre qu’ils auraient eu à compter avec les rivalités du dedans et les haines du dehors, ils n’avaient pas encore fait sur l’état social des études assez approfondies pour puiser dans la régénération de la société les éléments de leur influence et leurs moyens de gouvernement. Donc, au point où deux ans de règne avaient conduit les choses, et à n’interroger que les apparences, le despotisme en 1832 était plus probable que la liberté, et il eût été, ce semble, plus facile de recommencer Bonaparte que Washington. Mais quoi ! n’est-il jamais arrivé aux révolutions de tirer de leur propre fonds les ressources qui leur conviennent ? En général, on ne tient pas assez compte de tout ce que les sociétés mal organisées recèlent d’idées prêtes à éclore, de