Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/388

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’entrée de la duchesse de Berri à Nantes, et le lieu de sa retraite était encore un secret ; soit qu’à force de prudence, elle fut parvenue à déjouer tous les efforts de ses ennemis, soit que le gouvernement eût apporté dans ses poursuites une mollesse calculée. Car la duchesse de Berri, prisonnière, était un embarras et un danger. Son impunité, en effet, désignait Louis-Philippe au mépris des peuples ; sa mort le vouait à l’exécration des rois. Rendre la princesse à la liberté, c’était la rendre aux complots et à la guerre civile ; la faire juger, c’était mettre en action le principe de l’égalité devant la loi, principe fatal aux monarchies. Qui, d’ailleurs, la jugerait dans un pays qu’on voulait monarchique, cette mère d’un enfant, devenu roi par l’abdication de son aïeul ? La Pairie ? Devant une telle responsabilité elle aurait évidemment reculé d’épouvante. Un jury ? Quelques hommes pris au hasard auraient donc pu, en montrant la justice désarmée devant la royauté de la veille, condamner par cela seul, comme coupable d’usurpation et de félonie, la royauté du lendemain ! Invoquer, dans de semblables circonstances, le principe de la souveraineté du peuple, on ne le pouvait sans attacher en quelque sorte le mineur au pied du trône. Frapper dans la duchesse de Berri le crime de la révolte, on ne le pouvait sans rappeler sous quel effort avait succombé la plus fondamentale des lois de la monarchie, l’inviolabilité de Charles X.

C’étaient là des considérations d’une haute impôt tance. Elles durent prévaloir tant que la guerre étrangère ne fut pas imminente. Mais bientôt l’on