Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/408

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uns poussant des cris, les autres restant silencieux et immobiles, selon la diversité des opinions ou des sentiments. Louis-Philippe lut avec une émotion, dont une grande partie de l’assemblée ignorait encore la cause, le discours préparé par les ministres. Ce discours respirait la menace. Le gouvernement s’y félicitait de sa double victoire sur les factions, promettait de les accabler, s’exprimait en termes fort vagues sur la paix de l’Europe, et en termes décisifs sur l’impossibilité d’alléger les charges publiques. Nul doute qu’un pareil langage n’eût été froidement accueilli si, avant la fin de la séance, la nouvelle ne se fut répandue que Louis-Philippe venait d’échapper à la mort. Aussitôt toutes les opinions se réunirent dans une même pensée de réprobation et, le soir, les députés se rendirent en grand nombre au château ; ceux-ci, parce qu’ils étaient pénétrés réellement d’indignation et de douleur, ceux-là, parce qu’ils ne voulaient point perdre cette occasion particulière de flatter. « Eh bien ! dit le roi à M. Dupin, ils ont donc tiré sur moi ? — Sire, répondit M. Dupin, ils ont tiré sur eux. » Mot profond, mais qui calomniait tout un parti !

Et en effet, cet attentat n’était l’œuvre d’aucun parti, et les républicains en repoussèrent la solidarité avec une énergie hautaine et sincère. N’importe on vit se reproduire la polémique sans bonne foi, sans dignité, sans pudeur, que l’assassinat du duc de Berri avait soulevée sous la Restauration. Du fanatisme de quelques hommes les courtisans conclurent à celui d’une opinion, dont la logi-