Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/41

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Aux premiers l’on pouvait répondre : « Vous êtes-vous bien rendu compte du sens et de la portée de votre doctrine ? L’hérédité de la pairie détruite, que deviendra l’hérédité du trône ? Quoi ! vous ne comprenez pas que la royauté a besoin, pour vivre, d’avoir autour d’elle une classe qui ait le même intérêt, ou, si vous voulez, le même privilège à défendre ? Ce que vous aurez déclaré odieux dans une assemblée, le paraîtra-t-il moins dans un homme ? Ce que vous aurez refusé à ceux qui font la loi, l’accordera-t-on long-temps à celui qui la fait et qui l’exécute ? Qu’importe la responsabilité des ministres ? Cette responsabilité, on le sait bien, n’est qu’une chimère. Quand la lutte est engagée, vainqueur, le roi sauve ses ministres ; vaincu, il est entraîné dans leur chute. Charles X, monarque inviolable, vit aujourd’hui dans l’exil, et le châtiment de ses ministres n’a pu suffire aux vengeances du peuple soulevé ! Laissons donc là ces fictions vaines, bonnes tout au plus à amuser la crédulité d’une foule ignorante : elles ne protègent un pouvoir qu’autant qu’il n’a que faire d’être protégé ! Au surplus, l’inviolabilité royale, en supposant qu’on la respecte, n’est-elle pas un privilège, et le plus bizarre de tous, le moins facile à justifier par les règles ordinaires de la logique ? Lorsque vous aurez admis en principe que la transmission des fonctions politiques est une atteinte brutale à la justice, à l’égalité, à la raison, ne sentez-vous pas que la royauté sera sur les bords d’un abîme, puisque vous l’aurez réduite à n’être plus qu’une exception au principe par vous reconnu sacré, su-