Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/80

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garde national, posté à une fenêtre. Péclet, son ami, reçut deux balles dans le bras. On les emporta tout sanglants. L’insurrection perdait en eux les seuls hommes qui pussent, au moins pour quelques jours, lui imprimer une direction politique.

Déjà, du reste, la victoire se déclarait partout pour les ouvriers. La plupart des gardes nationaux sur qui les fabricants avaient compté se retiraient frappés de découragement et de stupeur. Quant aux soldats de ligne, ils opposaient aux insurgés une résistance molle et indécise. Encore tout pleins des souvenirs de 1830, ils mettaient en usage contre les libéraux les leçons que les libéraux leur avaient données. On avait dit aux soldats en 1830 que verser le sang des citoyens était le plus grand des crimes ; on avait battu des mains à la défection du 50e de ligne, le 29 juillet. Les soldats en 1831 pouvaient-ils avoir oublié tout cela ? Ils pensèrent que si le peuple parisien avait eu raison de se soulever en 1830 pour le maintien d’une charte qui ne le regardait pas, le peuple lyonnais avait bien plus raison encore de se soulever en 1831 pour le maintien d’un tarif qui l’empêchait de mourir de faim. Aussi la cause des ouvriers trouva-t-elle dans les troupes elles-mêmes une sympathie secrète qui favorisa le triomphe de l’insurrection.

A sept heures du soir, tout était fini. Ne pouvant plus se maintenir à la poudrière de Serin qu’il avait défendue pendant toute la journée au moyen de deux pièces de canon, le capitaine Peloux encloua ces deux pièces, fit jeter dans la Saône une grande quantité de poudre et battit en retraite. Enfin, aux