Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 4.djvu/104

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élective céda. La discussion fut close alors, et l’on vota définitivement l’adoption d’un système qu’on n’avait pas même pris la peine d’étudier. Puis l’on aborda, sans l’avoir étudiée davantage, la loi sur l’expropriation pour cause d’utilité publique.

L’extension abusive du droit de propriété a couvert la terre de révolutions et de crimes. L’abolition de l’esclavage sur une grande partie du globe, l’affranchissement des serfs, la chute de toutes les tyrannies féodales, la suppression des lois de substitution et de primogéniture, ont tour-à-tour témoigné de l’impatience du monde à porter le joug de la force victorieuse, mensongèrement transformée en domination légitime. Qu’est-ce que l’histoire, sinon le récit de la longue et violente révolte du genre humain contre le droit, mal défini et mal réglé, de celui qui « le premier ayant enclos un terrain, s’avisa de dire : ceci est à moi, et trouva des gens assez simples pour le croire » ?

Mais à de certains abus il faut un jour pour naître, plusieurs siècles pour mourir. En dépit de tous ces formidables essais de rénovation auxquels la France avait été soumise, en dépit de ce dogme de la fraternité humaine emprunté à la législation sublime de l’évangile, et proclamé hautement par le 19e siècle, au plus fort d’une tempête sans exemple et sans nom, le droit de propriété n’avait pas cessé d’être un despotisme absorbant et jaloux. Ce despotisme, il avait vu fléchir devant lui, en mainte occasion, Napoléon lui-même ; la Restauration l’avait respecté jusqu’au scandale ; et le mal était devenu si grand, après la révolution de juillet, qu’aucune