Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 4.djvu/105

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entreprise de route, de canal, de chemin de fer, n’était plus possible en France, tant on y méconnaissait ce principe posé par l’immortel auteur du contrat social : « Le droit que chacun a sur son propre fonds est subordonné au droit que la communauté a sur tous. »

Vaincre, la loi à la main, des résistances aussi aveugles qu’obstinées, était donc devenu indispensable. Le gouvernement dut s’y résoudre. Jusque-là, deux systèmes avait été successivement en vigueur et n’avaient eu que des résultats déplorables. En attribuant au conseil de préfecture le droit de statuer sur l’indemnité due au citoyen exproprié, la loi du 6 septembre 1807 avait mis trop complétement à la merci de l’administration l’intérêt privé. La loi du 8 mars 1810, au contraire, en remplaçant la juridiction de l’autorité administrative par celle de l’autorité judiciaire, avait pourvu d’une manière insuffisante à l’intérêt général. Il fallait sortir de ces deux voies également dangereuses, et faire du nouveau.

Doués d’une intelligence plus ferme, les ministres n’auraient pu réfléchir sur la matière, sans s’apercevoir qu’il y avait une grande lacune dans la constitution du pays, et qu’il était urgent de créer, non seulement pour le cas particulier dont on avait à s’occuper, mais pour tous les autres cas analogues, une autorité chargée de tenir la balance entre l’administration et les citoyens. Les tribunaux ont pour mission de régler les différends des citoyens entre eux, et non les différends qui s’élèvent entre un citoyen et l’administration ; le conseil d’Etat, tel qu’il