Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 4.djvu/309

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qui n’est pas assez connu ; ils ont provoqué une enquête ; ils ont donné lieu à une instruction judiciaire voici quelques pages extraites de ce dossier sanglant : « Mme d’Aubigny. – A cinq heures la troupe est arrivée par la rue de Montmorency ; elle a fait un feu nourri et s’est emparé de la barricade.

Peu après, un autre peloton de voltigeurs est survenu par la rue Transnonain, sapeurs en avant ; ils cherchaient, mais vainement, à briser la porte de notre maison, dont la solidité est extrême.

C’est la ligne s’est-on écrié dans la maison ; ah ! voilà nos libérateurs, nous sommes sauvés !

M. Guitard, mon mari et moi, nous descendons en toute hâte pour ouvrir. Plus leste que ces deux messieurs, je me jette à la loge de la portière, je tire le cordon, la porte s’ouvre. Les soldats se précipitent dans l’allée, font un demi tour à droite, frappent mon mari et M. Guitard, au moment où ceux-ci arrivaient à la dernière marche de l’escalier. Ils tombent sous une grêle de balles. L’explosion est telle, que les vitres de la loge, d’où je n’avais pas eu le temps de sortir, volent en éclats. J’eus alors un instant de vertige ; il ne me quitta que pour me laisser voir le corps inanimé de mon mari étendu près de celui de M. Guitard, dont la tête était presque séparée du cou par les nombreux coups de fusils qui l’avaient atteint. Rapides comme la foudre, des soldats, un officier en tête, franchissent le second étage. Une première porte pleine, à deux battants, a cédé à leurs efforts, une porte vitrée résiste encore. Un vieillard se présente, qui l’ouvre : c’est M. Breffort père. « Nous sommes, dit-il à l’officier, des gens tranquilles, sans armes ; ne nous assassinez pas. » Ces paroles expirent sur ses lèvres ; il est percé de trois coups de baïonnettes ; il pousse des cris. « Gredin, dit l’officier, si tu ne te tais pas, je te fais achever. » Annette Besson s’élance d’une pièce voisine pour voler à son secours. Un soldat fait volte-face vers elle, lui plonge sa baïonnette au-dessous de la mâchoire, et, dans cette position, lui lâche un coup de fusil dont l’explosion lance des fragments de la tête jusqu’aux parois du mur. Un jeune homme, Henri Larivière, ta suivait. Il est tiré de si près, lui, que le feu prend à ses vêtements, que le