Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 4.djvu/337

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On a vu de quelle manière, obéissant à une colère imbécile, le ministère avait été amené à charger la pairie de cet effrayant fardeau : le procès d’avril. Cette faute, une des plus grossières qu’un gouvernement ait jamais commises, éclatait déjà dans ses conséquences.Les tentatives faites en 1834 sur divers points du royaume n’étant considérées que comme les épisodes d’un même complot, il avait fallu donner à l’accusation des proportions colossales. Il avait fallu, pour rassembler les matériaux du procès, déployer un faste d’inquisition vraiment sans exemptes. On entassa poursuites sur poursuites, arrestations sur arrestations. Deux mille personnes furent appréhendées, quatre mille témoins interrogés, dix sept mille pièces mises sous les yeux des commissaires instructeurs !

Décréter l’amnistie en de telles circonstances, c’eût été faire acte tout à la fois de sagesse et de générosité. Aussi l’idée n’en fut pas plutôt émise qu’elle s’empara Irrésistiblement de l’opinion. La presse y puisa son thème favori ; elle prit place dans les entretiens de salon ; elle occupa les loisirs de l’atelier ; si elle éveilla parmi les captifs quelques sentiments de fierté rebelle, d’autre part elle agita d’une douce espérance leurs enfants, leurs femmes et leurs mères ; enfin, les amis les plus modérés du gouvernement crurent le moment venu pour lui de renoncer avec honneur un procès impossible et de cacher dans l’éclat de sa clémence ce qu’avaient eu de téméraire les inspirations de sa haine.

Mais c’est la maladie des gouvernements faibles