Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 4.djvu/439

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compétente, puisque l’offense contenue dans la lettre incriminée ne s’adressait qu’à la Cour des pairs. Cette thèse, M. Michel (de Bourges) la développa de la manière la plus brillante ; il l’appuya sur une série d’arguments qui n’admettaient pas de réplique ; mais que sert de raisonner contre la force ? La pairie, qui s’était reconnue compétente, à l’égard des accusés, se reconnut compétente à l’égard des défenseurs. Elle ne s’en tint pas là. Aux termes de la loi, on ne peut mettre en cause un citoyen pour délit commis par la voie de la presse, sans lui opposer sa signature autographe ; et c’était la première fois qu’on allait sommer des accusés de se déclarer, sur l’honneur, coupables ou innocents. Voilà ce que M. Armand Carrel releva dans un langage aussi noble qu’énergique. Mais, encore un coup, la pairie avait pris son parti des irrégularités les plus monstrueuses, et jusqu’au bout, la statue de la justice devait rester voilée.

Le président procéda en ces termes à l’interrogatoire : « Avez-vous signé la lettre ? L’avez-vous publiée ? En avez-vous autorisé la publication ? » Suivant la décision prise, tous les appelés répondirent, l’un après l’autre, par la négative. Quelques-uns, cependant, ne purent retenir le cri de leur conscience révoltée. « Je suis indigné, s’écria M. Reynaud, de l’injure qui nous a été faite à tous par cette Chambre. En nous empêchant de remplir notre ministère de défenseurs, et en nous consignant à la porte des prisons, la Cour a violé notre droit. Nous sommes les premiers offensés. Les sentiments de cette lettre sont les miens. Si