Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 4.djvu/76

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droit de châtier les auteurs d’écrits diffamatoires ; qu’au surplus, les lois du 23 mars 1822 et du 8 octobre 1830 rendaient rassemblée juge des insultes qu’on faisait monter jusqu’à elle.

Les seconds répondaient par des raisons empreintes de sagesse et de dignité. Une assemblée de législateurs devait-elle se commettre dans la mêlée des partis, au lieu de se maintenir avec calme et sérénité au-dessus des orages de la polémique ? Que pouvait gagner un corps politique à fouler aux pieds ce principe éternel de morale qui veut que nul ne soit à la fois accusateur, juge et partie ? La Chambre serait-elle réputée plus vertueuse quand elle se serait en quelque sorte délivré à elle-même un brevet de vertu ? S’il était vrai qu’en l’outrageant on eût outragé la nation, que ne laissait-elle aux tribunaux ordinaires, à la justice du pays, le soin de punir un tel attentat ? Pour faire respecter l’inviolabilité du législateur, un arrêt valait mieux, apparemment, qu’une vengeance ! Et les orateurs de la minorité rappelaient le Journal du Commerce traîné, sous la Restauration, à la barre d’une assemblée qui, en satisfaisant sa haine, n’avait fait que se dégrader ; et montrant du doigt M. Barthe, assis au banc des ministres, ils ajoutaient, par un rapprochement aussi terrible qu’inattendu : « Voilà l’homme que le Journal du Commerce eut alors pour défenseur ! » M. Garnier-Pagès cita ce trait du grand Frédéric qui, apercevant du haut des fenêtres de son palais un groupe d’hommes occupés à lire une affiche où il était insulté, ordonna que l’affiche fût placée plus bas pour qu’on pût mieux