donnerait-il sa démission ? Laisserait-il au comte de Damrémont, qu’on lui avait envoyé pour prendre sa place, le cas échéant, la conduite d’une entreprise aussi importante, aussi décisive ? Ou bien, sans renoncer au commandement, se bornerait-il à déclarer que le moment d’agir était passé, et qu’il fallait ajourner une expédition désormais compromise par une politique avare et de funestes retards ?
Ce dernier parti eût été le meilleur ; mais l’entreprise était depuis long-temps annoncée ; elle tenait éveillée l’attention publique elle devait servir de couronnement à des projets nourris avec complaisance, elle attirait un des fils du roi ; elle avait fait déjà tant de bruit parmi les Arabes, qu’à la suivre l’honneur pouvait paraître engagé… : le maréchal Clauzel prit le parti d’aller jusqu’au bout !
D’ailleurs, Joussouf, qu’il avait nommé bey de Constantine, n’avait cessé de lui souffler la confiance que craignait-on ? Il ne s’agissait en réalité que d’une promenade militaire les tribus étaient disposées à se soumettre ; Constantine n’attendrait pas une attaque et s’empresserait d’ouvrir ses portes. De telles promesses flattaient le secret penchant du maréchal : il s’y abandonna ; et les troupes eurent ordre de se réunir à Bone, qui devait être le point de départ.
On entrait dans le mois de novembre, et le ciel ne nous épargna point les avertissements sinistres. La pluie tombait jour et nuit par torrents. La neige couvrait les montagnes. Fatigués par le mal de mer, les soldats étaient entassés dans des casernes mal-