Page:Blanc - L’Organisation du travail.djvu/37

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
31
DU TRAVAIL.

Dira-t-on que ces tristes résultats sont exagérés ; qu’ils ne sont possibles, dans tous les cas, que lorsque l’emploi ne suffit pas aux bras qui veulent être employés ? Je demanderai, à mon tour, si la concurrence porte par aventure en elle-même de quoi empêcher cette disproportion homicide ? Si telle industrie manque de bras, qui m’assure que, dans cette immense confusion créée par une compétition universelle, telle autre n’en regorgera pas ? Or, n’y eût-il, sur trente-quatre millions d’hommes, que vingt individus réduits à voler pour vivre, cela suffit pour la condamnation du principe.

Mais qui donc serait assez aveugle pour ne point voir que, sous l’empire de la concurrence illimitée, la baisse continue des salaires est un fait nécessairement général, et point du tout exceptionnel ? La population a-t-elle des limites qu’il ne lui soit jamais donné de franchir ? Nous est-il loisible de dire à l’industrie abandonnée aux caprices de l’égoïsme individuel, à cette industrie, mer si féconde en naufrages : « Tu n’iras pas plus loin ? » La population s’accroît sans cesse : ordonnez donc à la mère du pauvre de devenir stérile, et blasphémez Dieu qui l’a rendue féconde ; car, si vous ne le faites, la lice sera bientôt trop étroite pour les combattants. Une machine est inventée : ordonnez qu’on la brise, et criez anathème à la science ; car, si vous ne le faites, les